Les bénéfices de la rééducation en piscine pour les animaux humains sont nombreux et bien documentés. À cet égard, il faut regretter que le site d’Amazon s’obstine à proposer des éditions périmées de la « somme » dirigée par Andrew J. Cole et Bruce E. Becker, Comprehensive Aquatic Therapy. Dans sa dernière édition, cet ouvrage de 558 pages comprend un chapitre « Watsu in Aquatic Rehabilitation » rédigé par Peggy Schoedinger, physiothérapeute et instructrice de Watsu.
L’hydrothérapie sert aussi à soigner quelques-uns de nos amis non humains comme les chiens et les chevaux de courses pour lesquels il existe toutes sortes d’appareils : bassins d’eau à niveau ajustable, bains à remous, tapis roulants immergés…
Pour la première fois, la rééducation en piscine vient d’être expérimentée avec une jeune éléphante dans une « clinique » de Chonburi, en Thaïlande. En octobre dernier, cette orpheline de cinq ou six mois serait tombée dans un piège aux abords d'un village. Et il a fallu amputer de 12 centimètres la patte avant gauche de celle qui a été baptisée Fah jam, « Ciel clair », pour lui porter chance.
Afin de permettre à la jeune éléphante de muscler sa patte blessée et de retrouver une capacité à marcher normalement, le vétérinaire Padet Siridumrong a décidé de recourir à l’hydrothérapie. On imagine combien les caractéristiques physiques de l’eau, comme la diminution du facteur de poids grâce à la poussée d’Archimède, peuvent se montrer précieuses pour la rééducation des troubles musculo-squelettiques d’un animal qui pèse déjà plusieurs quintaux (un éléphant d’Asie pèse 120 kilos à la naissance et, à l’âge adulte, 2,75 tonnes en moyenne).
Même si la Thaïlande fut le premier pays à ouvrir une clinique pour les pachydermes, l’accompagnement de Ciel clair dans la piscine paraît assez rustique. Sur la vidéo, on la voit, paniquée, s’agiter dans tous les sens en s’efforçant, avec le soutien de ses « rééducateurs », de maintenir sa trompe au-dessus de la surface. On est loin des très sophistiqués « tapis roulants immergés » dont peuvent bénéficier nos chevaux de courses ! Son vétérinaire reconnaît d’ailleurs que « c'est la deuxième fois qu'elle reçoit ce traitement d'hydrothérapie, elle est encore un peu nerveuse et elle a peur de l'eau ».
On peut aussi penser que la médiatisation de la séance d’hydrothérapie ne favorisait pas l’apaisement de Ciel clair. La médiatisation s’est poursuivie avec un tweet du New York Times :
A 5-month-old
elephant is getting hydrotherapy treatment in Thailand after being rescued from an animal
snare http://nyti.ms/2hX7bcA
Et une fois guérie ? Il est à craindre que Ciel clair, comme nombre de ses congénères, ne soit entraînée à faire le show dans le Nong Nooch Tropical Botanical Garden. Cette attraction touristique située à une vingtaine de kilomètres de Pattaya propose des spectacles de pachydermes aux 5 000 touristes qui s’y pressent chaque jour.
Philippe Quillien
Que l’eau soit près de 800 fois plus dense que l'air n’est pas un scoop : cette donnée se
rencontre dans tous les manuels de physique.
Pour en administrer une preuve… frappante, un physicien norvégien, Andreas Wahl, a
organisé une singulière expérience filmée pour la chaîne de télévision norvégienne NRK1.
En short de bain, il s'est immergé dans une piscine, debout à trois mètres d'un fusil
d'assaut chargé et pointé vers son torse. Après avoir compté jusqu’à trois, il a actionné la gâchette en tirant une cordelette.
À la sortie du canon, la balle possède la même force qu’au-dessus de l’eau. Si elle avait été tirée dans l'air, elle aurait pu atteindre son objectif à 200 mètres de distance. Mais, grâce à la résistance de l’eau, elle est rapidement freinée et, conformément aux prévisions du scientifique, elle tombe avec grâce et mollesse au fond du bassin bien avant d'atteindre sa cible.
Que l’on se rassure : la mécanique des fluides, l’hydrodynamique proposent des
équations sophistiquées et vérifiées pour calculer notamment la résistance à
l’avancement (ou force de traînée hydrodynamique). Comme le rappelle Andreas Wahl, « il est plus dur de créer le mouvement dans l’eau que dans l’air, car les molécules d’eau sont plus étroitement
liées que les molécules d’air ».
Andreas Wahl est coutumier de ces expériences apparemment extrêmes pour illustrer des lois de la physique : pour la même émission de vulgarisation scientifique, il a traversé un brasier après s’être aspergé d’eau ou sauté dans le vide à 13 mètres de haut en étant suspendu à une corde au bout de laquelle était accrochée… une petite boule rose.
Philippe Quillien
Vous vous êtes peut-être un jour demandé pourquoi, après 20 ou 30 minutes dans l’eau, vos doigts devenaient tout fripés. C’est la question très sérieusement étudiée par Tom V. Smulders, professeur à l’Institut de neurosciences de l’université de Newcastle, et son équipe. Et la réponse vient d’être publiée dans la non moins sérieuse revue Biology Letters de la Royal Society of London for the Improvement of Natural Knowledge, équivalent de notre Académie des sciences.
Contrairement à ce qu’ont longtemps cru les biologistes, l’explication n’est pas du tout que l’eau passe sous la peau et la fait gonfler. En fait, il s’agit d’un processus actif commandé par le système nerveux. « Lorsque le corps détecte que les doigts restent mouillés pendant un certain temps, le système nerveux contracte les vaisseaux sanguins sur le bout des doigts. Le volume des doigts se réduit mais, comme la peau garde la même taille, elle se plisse », explique Tom V. Smulders. C’est pourquoi cet effet disparaît lorsque les nerfs dans les doigts sont endommagés.
Dès lors que le système nerveux central et autonome intervient, cela suggère que le plissement possède une fonction spécifique. Les scientifiques de Newcastle ont repris une hypothèse récente de Changizi et ses collèges pour qui ces rides serviraient à améliorer la manipulation d’objet mouillés ou submergés. Pour l’établir, ils ont demandé à des volontaires d’attraper des billes de différentes tailles, d’abord avec les mains sèches, puis avec des mains préalablement plongées durant 30 minutes dans l’eau chaude. Or les cobayes manipulaient plus rapidement les objets lorsque les doigts étaient fripés. « Nous avons démontré que les doigts ridés assurent une meilleure prise des conditions humides ». Tom V. Smulders compare ce phénomène aux sillons creusés sur les pneus de voiture pour leur assurer une plus grande adhérence avec la route.
Selon ce neurobiologiste, il s’agirait d’une adaptation de l’évolution qui aurait aidé nos ancêtres à récolter des végétaux humides ou de la nourriture dans des cours d’eau. Et à se déplacer sur les surfaces humides, car le phénomène se produit également sur les orteils.
On peut bien sûr se demander pourquoi les doigts ne sont pas plissés en permanence. C’est que le plissement a un coût en provoquant une perte de sensibilité, comme peut le ressentir tout praticien ou étudiant de Watsu.
Philippe Quillien